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Portrait : Jean-Michel Vandamme, l’homme aux multiples casquettes

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Crédit photo : Imago

La nouvelle était dans les tuyaux depuis quelques semaines, elle est désormais officielle : Jean-Michel Vandamme fait son grand retour au LOSC. Nommé manager général de la formation, cet ancien de la maison retrouve l’un des nombreux postes qu’il a occupés durant ses 42 ans au LOSC. Portrait d’un Dogue aux multiples casquettes.

« Losciste » de père en fils

Né à Sedan le 10 novembre 1959, Jean-Michel Vandamme se retrouve baigné dans la culture foot. Il est le fils de Michel Vandamme, joueur professionnel de l’UA Sedan dans les années 1950 puis entraîneur à la JA Armentières. Son travail à la tête de l’équipe nordiste convainc le LOSC de le recruter en tant que formateur. Il s’occupe de l’encadrement des équipes des jeunes et participe grandement au développement de la formation lilloise. Son fils Jean-Michel, lui-même au centre de formation en tant que joueur à l’arrivée de son père, vient alors à peine de débuter son histoire au LOSC. Elle se prolongera finalement plus de quarante ans.

Formé au club, Jean-Michel Vandamme commence sa carrière de joueur en 1974, sous les ordres de Georges Peyroche. Il joue la plupart de ses matchs avec la réserve du club, et encadre les jeunes joueurs. Cela ne l’empêche pas de compter une dizaine de matchs en première division. Après dix ans de bons et loyaux services et un titre de champion de Division 2, le natif de Sedan se reconvertit en tant qu’entraîneur adjoint et assiste le coach belge du LOSC Georges Heylens, pendant cinq ans. Au début des années 1990, il rejoint le RC Lens, pour poursuivre son apprentissage en tant qu’entraîneur adjoint. Suite à cette courte expérience chez le voisin lensois, Jean-Michel Vandamme décide finalement de revenir dans la capitale des Flandres en 1993 pour être nommé directeur du centre de formation et s’investit pleinement dans ce nouveau projet. Petit à petit, la formation du club lillois commence à se développer, comme en témoigne l’épopée des jeunes Dogues en 2000 dans la coupe Gambardella. Battue en finale, l’équipe menée par Matt Moussilou, Stéphane Dumont et Sébastien Pennachio passe tout près du sacre mais finit par s’incliner face à Auxerre sur le plus petit des scores. Qui plus est, de plus en plus de jeunes Lillois garnissent les rangs de l’équipe première à la fin des années 1990. Les supporters lillois ont ainsi l’occasion de découvrir Christophe Landrin ou encore Geoffrey Dernis.

Jean-Michel Vandamme est intransigeant, notamment sur le comportement des jeunes formés au club : dans une interview au journal 20 minutes en 2014, il déclare que « les joueurs doivent respecter leurs professeurs autant que leur entraîneur. On insiste beaucoup sur les résultats scolaires. ». L’ancien Munichois Franck Ribéry fait les frais de ces exigences et ses écarts comportementaux répétés ont raison de son aventure lilloise. Le directeur du centre de formation sait s’entourer de formateurs de talent, et n’hésite pas à aller lui-même convaincre les jeunes joueurs de signer au club. Il négocie notamment l’arrivée des frères Cheyrou, en provenance du Matra Racing pour Benoit et de Lens pour Bruno.

De plus, il renforce des liens jusque-là difficiles avec les clubs de la région. En effet, en 1997, il propose aux clubs amateurs de la métropole de conclure un partenariat avec le LOSC qui favorise la venue de jeunes joueurs « locaux » dans le centre de formation. En échange, les clubs partenaires bénéficient d’avantages non négligeables, comme des visites de professionnels ou encore des invitations au match. Ce partenariat, qui peut paraître anodin, va pourtant permettre au LOSC d’écrire, quinze ans plus tard, l’une des plus belles pages de son histoire.

 

L’avis de… Sébastien Pennacchio : « Une figure emblématique du LOSC »

Sébastien, qu’est-ce que cela vous évoque lorsqu’on vous parle de Jean-Michel Vandamme ?

Jean-Michel Vandamme est une figure emblématique du LOSC. Il fait partie de la famille Vandamme, une famille historique du club, avec son père Michel Vandamme. Ce sont des gens qui ont beaucoup apporté au club.
C’est quelqu’un de toujours très investi dans son travail. Il est bienveillant, c’est une qualité primordiale pour un formateur. Comme on dit, c’est un donneur de confiance, c’est quelque chose qui le caractérise.

Quelle importance a eu Jean-Michel Vandamme dans votre parcours au LOSC ?

Avant de signer au LOSC, j’étais sur le point de signer pour le voisin, le RC Lens, mais j’ai finalement été repéré par Jean-Michel Vandamme, alors directeur du centre de formation. Un soir, il vient chez moi, avec mon entraîneur, pour me convaincre de signer à Lille. A l’époque, j’habitais en face du stade. Il m’a convaincu, et c’est comme ça que tout a commencé. Son implication pour me faire signer quand j’étais jeune montre à quel point il s’investit dans ce qu’il fait pour le club. Il s’était déplacé spécialement à Tourcoing, était venu jusque chez moi pour me convaincre de signer. Il n’était clairement pas obligé de le faire, ça montre toute son implication dans un projet.

On a toujours eu une très bonne relation lui et moi. J’ai évidemment beaucoup de respect et d’admiration pour la personne. Au fur et à mesure, notre relation s’est développée, notamment ces derniers temps. Aujourd’hui, il y a une sorte de feeling, honnêtement c’est assez étrange à décrire. Il y a un fort lien de confiance entre nous deux.

Au moment de revenir au LOSC en 2011, lui comme Rachid Chihab m’ont tous deux convaincus de revenir dans le Nord. J’étais très heureux, et l’expérience a duré plusieurs saisons. Il y avait beaucoup de bonnes choses à en tirer. Il me connaissait, il savait que j’avais le profil idéal pour encadrer les jeunes de la réserve. Finalement, j’avais plusieurs tâches : j’avais un profil d’expérience, je jouais à la fois le rôle de « grand frère », d’accompagnateur pour les jeunes de la réserve, et le rôle de relai pour lui. Tout s’est très bien passé. J’ai pu côtoyer Benjamin Pavard, Lucas Digne, Martin Terrier, Divock Origi, Lebo Mothiba, Jean-Eudes Aholou… beaucoup de jeunes futurs pros sont passés par là.

Après quelques années de flottements, marqués par les départs de certains historiques (Jean-Michel Vandamme, François Vitali, Patrick Collot…) la formation semble revenir au premier plan. Comment voyez-vous cela ?

On dit souvent que les histoires d’amour finissent mal (rires). C’est clair que ces départs n’ont pas été l’un des meilleurs moments pour moi, mais bon le football bouge beaucoup, je pense que ça devait se passer comme ça. Quand il y a des mauvaises nouvelles, il faut continuer d’apprendre. On voit que le Président Olivier Létang semble vouloir redorer la formation et retrouver un certain ancrage local, avec des personnes qui portent les valeurs historiques du LOSC. Je vois d’un très bon œil ce retour de la formation au premier plan. Ce sera certainement bénéfique pour les clubs de la région. Forcément, les échanges seront plus faciles, toutes les personnes qui travaillent dans ces clubs pourront être proches de Jean-Michel Vandamme ce qui pourrait certainement être bénéfique pour eux.

 

Un travailleur de l’ombre

L’accord passé par Jean-Michel Vandamme avec les clubs locaux permet au LOSC de récupérer les meilleurs footballeurs en herbe de la métropole. Rejoignent le club les jeunes Mathieu Debuchy, en provenance de l’US Fretin, et Yohan Cabaye, en provenance du Tourcoing FC. Mais le recrutement des jeunes ne s’arrête pas à la simple « banlieue » lilloise : le LOSC est capable d’aller chercher plus loin, et n’hésite pas à aller piocher dans les réservoirs belges ou parisiens. Plus tard, ce sont donc les jeunes Belges Eden Hazard, Gianni Bruno et Divock Origi qui rejoignent Luchin directement en provenance du plat pays, tandis que Lucas Digne quitte l’Ile-de-France pour le Nord. Et ce n’est pas tout.

Jean-Michel Vandamme est un proche de Jimmy Adjivi Boco, qu’il a connu lorsqu’il était entraîneur adjoint à Lens, et est un ancien coéquipier de Bernard Lama, lorsque ce dernier gardait les cages du LOSC dans les années 1980. Lorsque les deux anciens footballeurs se lancent dans l’aventure de l’Académie Diambars au Sénégal, le directeur du centre de formation flaire le bon coup. Officiellement, rien ne lie le LOSC et Diambars. Mais en réalité, le club lillois va pendant plus de dix ans enrôler de jeunes joueurs venus de ces académies africaines (Sénégal, Afrique du Sud). Dès le milieu des années 2000, l’académie Diambars se rend chaque printemps au Domaine de Luchin. C’est dans ces conditions que Jean-Michel Vandamme repère en 2007 Idrissa Gana Gueye et Pape N’Diaye Souaré. D’autres joueurs de Diambars suivent comme Omar Wade ou encore Lebo Mothiba.

Plus globalement, le centre de formation lillois renforce ses liens avec les académies africaines, comme l’académie Jean-Marc Guillou (Rominigue Kouamé, Yves Bissouma, Adama Traoré) ou l’académie des Brasseries au Cameroun (Didier Lamkel Zé). Loin de l’accumulation de joueurs qu’a pu connaitre la réserve lilloise ces dernières années, Jean-Michel Vandamme favorise alors la sélection de certains profils qui permettent, à terme, de faire passer un cap à l’équipe première. Il n’hésite pas non plus à tenter des paris osés, enrôlant des joueurs amateurs venus de divisions inférieures comme Adil Rami ou Aurélien Chedjou. Pour des résultats plus que probants.

Le LOSC arrive ainsi en 2011 avec un effectif impressionnant, en grande partie constitué de joueurs repérés et supervisés par Jean-Michel Vandamme. Le groupe compte notamment dans ses rangs Debuchy, Gueye, Cabaye, Souaré, Hazard, Rami, Chedjou et autre Dumont qui vont prendre pleinement part au doublé historique du LOSC. Ils deviennent pour la plupart d’entre eux des incontournables de leur sélection, avant de rejoindre, plus tard, de grands clubs européens (Chelsea, PSG, le Real Madrid ou encore l’AC Milan).

L’aventure de Jean-Michel Vandamme à la tête de la formation est une véritable réussite. Outre une nomination en tant que Directeur général adjoint en 2009, l’ancien joueur lillois est également nommé responsable de la cellule de recrutement en 2011 suite au départ de Jean-Luc Buisine pour Monaco.

 

L’avis de… Corentin Halucha : « Son retour est un vrai plus »

Tout d’abord, lorsque je vous parle de Jean-Michel Vandamme, qu’est ce qui vous vient à l’esprit ?

C’est son papa (Michel Vandamme) qui m’a ramené à Lille à sept ans, et c’est lui qui est un des artisans de mon premier contrat pro. C’est un nom qui a de l’importance pour mon parcours et moi. Au début, lorsque je suis arrivé, je dirais que je connaissais plus son papa. Puis il a été de plus en plus présent sur la fin, c’est à ce moment-là que je l’ai le plus côtoyé. C’est un nom qui marque, un nom important pour le club. On avait une relation professionnelle, c’est quelqu’un de concentré, qui sait gérer ses équipes et qui sait où s’arrêter, il ne vient pas mettre son nez là où le coach travaille. Il gère les équipes via ses relais, il nomme des gens de confiance. Il était souvent présent au bord des terrains comme il travaillait à Luchin. Il assurait l’encadrement du centre, il gérait les contrats. On ne peut pas dire non plus qu’il était en retrait, il savait juste s’entourer d’hommes de confiance et de très bons coachs.
En tant que jeune joueur, on ne le fréquente pas tous les jours. Ça reste un supérieur que l’on voit de temps en temps.

Suite à votre départ en 2017, lui en avez-vous voulu ?

Je ne lui en ai pas voulu du tout. A ce moment-là, c’est les prémices du projet Lopez. Campos prend de plus en plus d’importance et d’autres membres et joueurs plus anciens se retirent. Jean-Michel Vandamme se met en retrait, la fin de cette saison est vraiment marquée par le nouveau projet. La vente du club s’est faite de manière progressive. On voyait clairement que ça arrivait sur la fin. Mais lui n’a pas vraiment eu d’incidence sur la fin de mon contrat, donc je ne lui en veux pas.

Après quelques années de flottements au sein de la formation, que pensez-vous de son retour à la tête de formation lilloise ? Est-ce un symbole ?

Au départ, on pouvait penser qu’avec la fin prématurée du projet Lopez, on allait reculer, mais finalement, je pense que l’on va retrouver un certain équilibre. Sa venue va attirer et amener des anciens, il va de nouveau très bien s’entourer comme il sait le faire, c’est un vrai plus pour tout le monde. Le projet semble presque être bâti autour de la formation lilloise. Olivier Létang fait bien les choses, il remet la région presque au cœur du projet. Ça avait presque disparu sous le projet Lopez. Puis je me mets à la place des clubs de la région, et plus particulièrement de mon club Wasquehal. Mes dirigeants disent qu’ils récupèrent plus de joueurs qu’ils n’en envoient au LOSC. Alors sur le court terme, c’est bien pour Wasquehal puisque tu récupères des joueurs de qualité. Mais c’est peut-être aussi plus intéressant d’envoyer des joueurs. Un jour, un joueur qui arrive à jouer en pro peut leur apporter un peu d’argent. Un joueur qui est formé dans un club amateur permet à son club formateur de toucher quelque chose. C’est un très bon directeur du centre de formation, il va ramener de très bons coachs, il va renouer le contact avec les clubs partenaires, et il va certainement y avoir plus d’échanges avec ces derniers. Les jeunes vont de nouveau se sentir capables d’aller à Lille.

 

Un retour programmé

Après le doublé, Jean-Michel Vandamme développe avec Frédéric Paquet (l’autre directeur général) la cellule de recrutement lilloise. Endetté, le LOSC se doit de flairer les bons coups et peut compter sur des recruteurs de talent. Le LOSC relance Simon Kjaer, alors remplaçant à Wolfsburg, déniche Marko Basa en Russie et Vincent Enyeama en Israël. Le système fait donc ses preuves et permet au club du Nord de jouer les premiers rôles en Ligue 1.

Lors du départ de Frédéric Paquet en 2015, Michel Seydoux n’hésite pas à nommer l’Ardennais en charge du sportif. François Vitali, qui avait pris le relais à la tête de la cellule de recrutement, retrouve un rôle de formateur, tandis que Jean-Michel Vandamme s’occupe majoritairement de l’équipe première. L’ancien adjoint de Georges Heylens doit se débrouiller avec des moyens réduits. Malgré les bons résultats sportifs et les nombreuses plus-values réalisées au début des années 2010, le LOSC doit se serrer la ceinture. Le coût du Stade Pierre-Mauroy et le déficit accumulé les saisons précédentes ne permettent plus au club de se payer des stars du football européen. Le natif de Sedan l’annonce lui-même lors d’une conférence de presse : « le LOSC doit d’abord vendre pour pouvoir acheter », et doit faire preuve d’une certaine débrouillardise : « Quand on n’a pas de pétroles, on a des idées ». Conséquence directe : malgré la qualité de sa formation, le LOSC commence à devoir vendre ses joueurs formés au club et ce, dès leur plus jeune âge. Lucas Digne, Divock Origi, ou encore Adama Traoré partent pour un peu moins de quinze millions d’euros chacun après à peine une saison complète en professionnel.

A l’aube de la saison 2015-2016, Jean-Michel Vandamme souhaite donc mettre en place un nouveau projet, basé sur la formation et la post-formation de jeunes joueurs. Malgré un mercato mouvementé et l’échec Hervé Renard, le club se relance et arrache même une qualification pour les barrages de l’Europa League, suite à un mercato d’hiver déterminant (Morgan Amalfitano, Rony Lopes et Eder rejoignent le club). Mais la situation financière du LOSC ne cesse de se dégrader, si bien que les Dogues se voient obliger de faire des montages financiers rocambolesques pour finaliser l’arrivée des recrues Nicolas De Préville, Younousse Sankharé et Naïm Sliti. En parallèle, la formation lilloise semble de moins en moins mise en avant par les coachs de l’équipe première. Exemple le plus frappant : Frédéric Antonetti décide de ne pas retenir le prometteur Benjamin Pavard, repéré par Michel Vandamme et encadré tout au long de son parcours en équipe de jeunes par son fils Jean-Michel. On ne le sait pas encore, mais les Dogues viennent de laisser partir le futur titulaire au poste d’arrière droit en Equipe de France.

Alors que le projet lillois semble à son apogée, les crises du Covid et de Mediapro ont raison de Gerard Lopez, qui quitte le club par la petite porte, laissant sa place à Olivier Létang. Ce dernier avance tout de suite son intention de rénover la formation lilloise : fini les contrats pros à gogo et l’empilement de « paris », place à un modèle plus raisonné et plus ambitieux pour la formation des jeunes Dogues.

Après une courte expérience à la tête de la cellule du recrutement de la formation de Saint-Etienne et dans un rôle d’agent, Jean-Michel Vandamme revient aux affaires à Lille, dans le rôle de manager général d’une formation lilloise décimée par le projet Lopez. Depuis son départ, plus un seul jeune formé au club n’a foulé la pelouse du Stade Pierre-Mauroy…

Après plus de 40 ans au service du LOSC, Jean-Michel Vandamme est devenu une figure emblématique du club lillois. Après des expériences réussies à la tête de la formation et du recrutement lillois, son retour est assurément une très bonne nouvelle pour les jeunes formés au club et pour les supporters.

Joseph da Rocha

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